Changements climatiques : L’Algérie face à des vulnérabilités économiques et climatiques (Yassaa)

Dans cette période de grandes chaleurs où la consommation d’énergie, notamment électrique, bat des records, c’est le débat sur les changements climatiques et la transition énergétique qui vient d’être relancé, en s’interrogeant sur les moyens à mettre en pace et la démarche à adopter pour rattraper les retards en la matière.

C’est dans cette perspective que le professeur Noureddine Yassaa, Commissaire aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique auprès du Premier ministre, vient de rappeler qu’en l’absence d’une transition énergétique effective, l’Algérie est doublement vulnérable, à savoir sur les plans climatique et économique en même temps.

« L’Algérie fait face à une double vulnérabilité : climatique et économique. D’abord le risque climatique, avec les canicules, sécheresses et incendies de forêts, etc., mais aussi, la dépendance économique de l’exportation des énergies fossiles», a déclaré sur les ondes de la chaine 3 de la radio nationale ce lundi Pr Yassaa, qui vient aussi d’être élu au poste de vice-président du GIEC (Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat), relevant de l’ONU, à l’issue de la 59ème session dudit panel, qui s’est tenue du 25 au 28 du mois courant dans la capitale Kenyane, Nairobi.

En attendant la généralisation de la production des énergies vertes et la réalisation des projets prévus dans ce domaine, notamment l’installation de stations de production d’énergie solaire, Pr Yassaa regrette qu’en Algérie, «il y a beaucoup d’établissements scolaires dotés de kits photovoltaïques, mais il est aberrant que, durant ces périodes de vacances scolaires, ce potentiel d’énergies renouvelable n’est pas utilisé, pourtant il est déjà disponible, alors que ces derniers jours, les pouvoirs publics ne cessent pas d’annoncer que des pics de consommation d’électricité sont atteints du fait des chaleurs caniculaires».

Le vice-président du GIEC met également le doigt sur un autre point qui nécessite d’être revu, à savoir, les systèmes de production d’électricité, estimant «qu’il faut redimensionner toutes les infrastructures (de production et distribution d’électricité) en tenant compte des nouveaux records de températures », car, précise-t-il, peut être que ces installations « ont été dimensionnées pour des températures maximales de 45 °C, or que maintenant on frôle les 50 °C, ce qui a un impact sur le réseau de distribution, sur les transformateurs, etc. Donc, le changement climatique est une donnée essentielle que tous les bureaux d’étude et d’architecture doivent intégrer » pour tous les nouveaux projets de réalisation.

Injustice climatique et responsabilité des pays industrialisés

A l’échelle planétaire, Noureddine Yassaa estime qu’actuellement le réchauffement climatique enregistre 1,1 °C de plus et le GIEC prévoit des hausses de températures de l’ordre de 1,5 °C à l’horizon 2030.

En plus de la hausse des températures, la planète est de plus en plus « exposée à des catastrophes en cascades », dont des épisodes caniculaires comme ceux de ces dernières semaines qui n’ont épargné aucune région au monde, y compris le continent européen, des feux de forêts, des inondations et autres.

Face à ces urgences, le Commissaire aux énergies renouvelables et à l’efficacité énergétique estime que «tous les pays du monde doivent se mobiliser d’une manière collégiale pour atténuer les émissions de gaz à effets de serre».

Cette mobilisation collective est incontournable, estime-t-il, car, « il y va de la sécurité de la planète et de tous les pays, de la sécurité des êtres humains, des écosystèmes qui sont actuellement tous menacés par les impacts néfastes des changements climatiques ».

Quant à la responsabilité des Etats dans les émissions de gaz à effets de serre, Pr Yassaa affirme que « le GIEC vient d’élaborer un bilan qui met en avant la responsabilité historique des pays industrialisés et fait ressortir aussi que (la marge de manœuvre) qui permettra de limiter la hausse des températures à 1,5 °C est justement consommée par ces pays développés ».

Selon le vice-président du GIEC, ce bilan souligne que « jusqu’à 45% des émissions mondiales de gaz à effets de serre sont générés par 10% de la population mondiale avec les revenus les plus élevés. Or, nous sommes face à une injustice climatique, car ce sont les pays en voie de développement, qui ne sont pas responsable du réchauffement climatique, qui en subissent les effets néfastes de plein fouet ».

Pour réparer cette injustice, un fonds de compensation des pertes et préjudices subis du fait des changements climatique vient d’être créé à l’issue de la COP 27, qui s’est tenue en novembre 2022 en Egypte, mais «les flux financiers sont très loin des objectifs affichés, à savoir 100 milliards de dollars par an pour accompagner les pays les plus vulnérables face à la menace climatique», regrette-t-il, suggérant que «les pays en voie de développement doivent maintenir la mobilisation et revendiquer leur droit à être soutenus dans la lutte contre les changements climatiques».

M. Naïli

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