Remplissage des barrages : niveaux insuffisants malgré les récentes pluies

Après les premiers mois de la saison hivernale fortement déficitaires en précipitations, notamment décembre 2022, le nord du pays a connu une activité pluviométrique conséquente ces dernières semaines, avec des prévisions plus ou moins optimistes pour le reste du mois de mars en cours.

Ceci a permis une amélioration relative de l’état des barrages et des retenues collinaires à travers plusieurs wilayas du pays, dont le taux de remplissage était de 32% seulement en janvier dernier avant de frôler les 50% à la fin du mois de février dernier, notamment dans l’est du pays. D’autres quantités sont attendues dans les jours à venir avec les précipitations de ces derniers jours et la fonte des neiges qui ont couvert les massifs montagneux  de l’est et du centre du pays et des Hauts-Plateaux en février et début mars.

Interrogé sur l’état actuel des barrages après les récentes précipitations, l’hydrologue Malek Abdeslam, directeur du laboratoire des eaux de l’Université Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou, expliquera, dans le détail, que «les apports des dernières précipitations depuis fin janvier, après pratiquement un mois sans pluies où décembre a été déficitaire de 60 à 70%, se sont concentrés dans le littoral centre et est, plus Médéa-Miliana».

Si le niveau actuel des barrages s’est amélioré avec les pluies de ces dernières semaines, le taux de leur remplissage demeure, toutefois, insuffisant. Ceci est dû à la situation critique dans laquelle ils se trouvaient au début de la saison hivernale, estime le spécialiste. «Les barrages étaient à un niveau très bas, inférieur à 20%, avec un taux national moyen de 37%, tiré vers le haut essentiellement par les deux grands barrages de Beni Haroun, dans la wilaya de Mila, et Tabellout, dans la wilaya de Jijel, déjà pleins l’an dernier. Pour le reste, le remplissage a été faible partout, et les dernières pluies ont servi à remplacer les volumes pompés», explique Abdeslam qui précisera qu’à la fin janvier, le taux moyen n’a pas atteint les 37%, avec des niveaux plus critiques par endroits, comme c’est le cas du barrage Taksebt, dans la wilaya de Tizi Ouzou qui était à moins de 20%.

C’est pourquoi, d’ailleurs, rappelle-t-il, «les pouvoirs publics ont mis en place des mesures de restriction, en pompant moins et en activant des programmes de distribution alternée».

Des volumes moins importants qu’en 2022

A une question sur l’apport des neiges qui ont touché notamment les wilayas de l’est et du centre du pays sur l’état des barrages, le responsable du laboratoire des eaux de l’Université de Tizi Ouzou préfère relativiser en précisant que «la fonte des  neiges est un écoulement continu et retardé. Les quantités sont toujours faibles et compensent juste les prélèvements. On ne constate pas de gros apports sachant que les surfaces enneigées sont spectaculaires mais réduites aux sommets».

Contrairement aux estimations faisant état de l’amélioration de la situation cette année, le niveau des barrages est encore en deçà de ce qui pourrait assurer un approvisionnement normal dans les mois à venir, notamment en été, que ce soit en eau potable ou à usage agricole.

Sur ce point, l’hydrologue Malek Abdeslam précise que les volumes emmagasinés actuellement dans les barrages sont inférieurs à ceux de l’année précédente, citant l’exemple du barrage de Taksebt, dont il suit l’évolution quasi quotidiennement. «Son niveau est encore très bas comparativement à début mars 2022 où ces volumes étaient de 52 millions m3 contre 33 à 35 millions m3 au début mars de l’année en cours», indique-t-il. Enfin, conclut-il, «pour avoir des quantités significatives dans les barrages permettant d’éviter les pénuries d’eau en été, on doit avoir des pluies exceptionnelles. Trois fois les moyennes interannuelles de ce qui tombe en mars et avril au moins. On a déjà eu 300 mm en mars 2012 et 260 mm en avril 2007 à Tizi Ouzou, ceci est possible, mais aléatoire».

Le même constat est établi par le ministre des Travaux publics, de l’Hydraulique et des Infrastructures de base, Lakhdar Rekhroukh. «Le taux de remplissage des barrages a diminué de 5% par rapport à l’année précédente», avait-il indiqué récemment.

Mohamed Naïli

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