Interpeller l’opinion publique sur les problèmes qui entravent le développement du secteur des TIC est l’objectif premier de l’Association des opérateurs alternatifs des télécoms.
Ces derniers ont annoncé, au cours d’une conférence de presse organisée en juin dernier, la création de leur association et expliqué les raisons qui les ont amenés à s’organiser pour défendre leurs intérêts et ceux des Algériens qui tous doivent pouvoir accéder à moindre coût et dans tous les coins du pays aux TIC..
[dropcap]«L[/dropcap]es technologies de l’information et de la communication irriguent tous les secteurs, leur importance n’est plus à démontrer.
Il s’agit aujourd’hui d’économie numérique dont le rôle est fondamental dans le développement d’un pays.
Or, en Algérie, nous sommes encore au bas de l’échelle, notre pays occupe la 100e place en matière de connectivité dans le classement du World Economic Forum», soutient Ali Kahlene, PDG de l’entreprise Satlinker et président de l’association, avant de revenir sur le rôle et les objectifs de cette nouvelle organisation professionnelle.
Une association qui a décidé de prendre le taureau par les cornes en faisant, sans complaisance aucune, un état des lieux de ce qui ne va pas ou qui freine l’évolution des TIC dans notre pays, qui de l’avis de tous accusent un réel retard en la matière pour plusieurs raisons, entre autres celle pénalisante de la tarification, très souvent supérieure au coût réel.
Ceci alors que les pouvoirs publics avaient dès la fin des années 90 manifesté leur intention d’arrimer le pays aux nouvelles technologies.
Pour rappel la déclaration de politique sectorielle relative aux télécommunications de 1999 a entraîné des réformes importantes dans le secteur des TIC.
Le but étant d’asseoir une société d’information basée sur l’ouverture.
Cette déclaration de politique sectorielle a été accompagnée d’une série de lois.
Un cadre juridique clair fixant dans les détails ce que devraient être les relations entre les différents acteurs dans le secteur dont on attendait qu’ils participent activement au développement du pays en matière de télécommunications.
Une quinzaine d’années plus tard les choses n’ont pas vraiment bougé, concluent les membres de cette association qui soutiennent publiquement que «les objectifs liés à cette déclaration de politique sectorielle n’ont pas été atteints.
L’offre reste en deçà de la moyenne, ce qui relègue l’Algérie au bas du classement des pays en termes d’adoption des nouvelles technologies».
Lotfi Nezzar, PDG de l’entreprise SLC, vice-président de l’association, revient au cours de cette rencontre avec les médias sur les raisons qui ont poussé les opérateurs alternatifs à se regrouper : «Notre association vise à promouvoir le secteur des TIC, mettre en place une situation pour le consommateur afin qu’il ait le choix et défendre les intérêts de ses opérateurs.»
Et c’est là une préoccupation majeure des membres de l’association qui estiment que leurs intérêts ont souvent été bafoués.
«Si aujourd’hui, le citoyen ne dispose d’aucune offre à part celle de l’opérateur historique, cela ne veut pas dire qu’il n’existe pas d’autres offres», fait remarquer Lotfi Nezar qui revient sur les lois qui régissent le secteur.
«Les opérateurs alternatifs,sont obligés d’acheter de la capacité chez l’opérateur historique qui, à son tour, est tenu par les textes d’appliquer en matière de tarification certaines normes, conformément décret 02-159.
Pourtant, ce texte n’a jamais été appliqué et la tarification à laquelle nous sommes soumis est 10 fois supérieure au coût réel.
C’est pour cette raison que nous sommes cloisonnés sur une niche entreprise.»
Et d’ajouter que «cette situation dure depuis des années».
Une situation qui pénalise ces entreprises qui veulent se développer en faisant profiter le grand public de leurs offres.
Les entreprises qui se sont accrochées et qui refusent de jeter l’éponge sont convaincues que toutes les difficultés peuvent être aplanies si l’Autorité de régulation joue effectivement le rôle qui est le sien.
Quel rôle pour l’autorité de régulation ?
Les opérateurs alternatifs qui ont «survécu», s’interrogent sur le rôle de l’ARPT.
«Sa mission est de protéger les intérêts des opérateurs alternatifs et de leur permettre d’évoluer dans un écosystème serein. Sauf que le régulateur n’intervient que dans l’éventualité d’une plainte déposée par un opérateur», fait remarquer Lotfi Nezar.
En clair, l’ARPT n’agit que si elle est saisie et même quand sa réponse n’est pas toujours évidente.
Sur ce point précis, le PDG de SLC dira qu’en 2008, son entreprise a déposé une saisine au niveau de l’autorité de régulation.
«Cette saisine était pour dire que les tarifs pratiqués par l’opérateur historique mènent les ISP à la faillite et ceux qui ne sont pas dans le grand public vont se cloisonner dans une niche avec une perte massive de clients.
Ce qui s’est réellement concrétisé par la suite.» Parmi ces opérateurs, il cite Djaweb, qui a réintégré la maison mère, et l’EEPAD qui a fait faillite suite à des factures exorbitantes.
Il souligne que cette saisine n’a jamais été traitée.
Le vice-président de l’association appelle les autorités concernées à appliquer les lois en vigueur, principalement dans la restructuration des coûts.
«Si ces prix ne sont pas revus à la baisse, qu’on nous permette d’investir. Nous sommes capables de déployer de la fibre à l’international mais notre statut actuel ne nous le permet pas.»
N’ayant pas d’interlocuteur fiable, efficace, ces opérateurs veulent à la travers cette association donner un coup de pied dans la fourmilière et contribuer à la relancer du secteur des TIC dont le retard est à l’origine du recul de la compétitivité globale de l’Algérie en matière de connectivité à l’heure où les techniques numériques sont en train de bouleverser l’économie mondiale.
Rétrospective
[box type=”warning”] [dropcap]S[/dropcap]i l’on se réfère aux textes de 1999, une déclaration de politique sectorielle des TIC a été mise en place. Celle-ci prône l’ouverture du secteur, et la concurrence loyale.
Appuyée en 2000 par la loi 2000-03 qui définit dans le détail les missions, les objectifs et les rapports qui devraient exister entre les différents acteurs du secteur des TIC. Ainsi, «l’orientation vers les coûts, c’est-à-dire lorsqu’un opérateur alternatif achète des liaisons chez l’opérateur historique, celui-ci est tenu par les textes de ne faire aucun bénéfice.
Suite à cela, nous avons connu une ère de développement incroyable, que ce soit pour le GSM ou dans le domaine d’internet avec l’installation d’une centaine d’ISP qui ont beaucoup investi.
Répondant au premier objectif de cette politique sectorielle qui est l’ouverture.
Cette loi promettait aux acteurs du secteur une concurrence loyale et saine sous l’oeil bien veillant d’une autorité de régulation indépendante et autonome dont le rôle, rappelons-le, est de veiller à l’application des lois».
Cependant, cette loi a été «occultée», ce qui a entraîné la disparition de nombreux opérateurs tels que l’EEPAD, les opérateurs alternatifs de VoIP et beaucoup d’autres. Laissant le terrain libre à l’opérateur historique.
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Le secteur des TIC en chiffres
[box type=”info”] [dropcap]L’[/dropcap]
offre en termes de services en télécommunication est en deçà des standards régionaux. La télé-densité (qui mesure le nombre de lignes du réseau fixe par 100 habitants) en Algérie est faible et se situe à 5,02% contre 5,44% au Maroc et 8,06% en Tunisie.
Au sein de la région Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (Mena), la moyenne est de 8,05%.
La densité téléphonique se situe à 0.26% (abonnés au réseau mobile par 100 habitants) en 1999. Si l’on prend à titre d’exemple la Tunisie, le taux de pénétration de la téléphonie mobile est de 0,74%.
La demande non satisfaite de services de télécommunication entrave la croissance économique, affecte les consommateurs, limite la compétitivité des entreprises algériennes et constitue une contrainte pour les investissements potentiels.
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