Catégorie : Editorial

  • Le temps des affaires au beau fixe

    Faut-il se réjouir lorsque des investisseurs américains, maghrébins et européens laissent étaler au grand jour leur intérêt à s’installer durablement sur le marché algérien ?

    Bien sûr que oui, dés lors que ce regain d’intérêt pour l’Algérie, et, évidemment, ses immenses capacités financières, redonne de la consistance aux programmes de développement du pays.

    Même si l’altruisme est une donnée inexistante, sinon devenue rare par les temps d’extrême égoïsme qui caractérisent les relations politiques actuelles, il est une évidence que les potentialités du marché algérien, même bridé selon beaucoup par la règle des  »51/49% », attirent et mobilisent l’attention des états- majors des grandes entreprises internationales.

    Énergie, BTP, agriculture, hydraulique, habitat, TIC, rien n’est laissé en rase campagne de cet intérêt à l’Algérie. Après la France, qui a nommé il y a deux ans un Monsieur Algérie pour les affaires économiques,
    en l’occurrence M. Jean Pierre Raffarin, qui a débloqué trois grands dossiers de coopération lors de son 5e déplacement fin novembre à Alger, c’est dans la lointaine Albion que le Premier ministre David Cameron a nommé lui également son Monsieur Algérie en la personne de Lord Risby, chargé de dynamiser les relations économiques et de partenariat entre les PME des deux pays.

    La visite en Algérie du président français, François Hollande, prévue les 19 et 20 décembre prochains, procède autant de la volonté de l’Algérie et de la France de rénover profondément leurs relations plurielles, mais surtout de doper le partenariat économique entre les deux pays.

    Annonciatrice de beaucoup de nouveautés, notamment dans le domaine économique et en direction des PME, cette visite du président français serait porteuse de beaucoup de nouveautés dans la conception des nouvelles relations économiques que les deux pays veulent dorénavant instaurer.

    Une démarche, d’ailleurs suivie des États-Unis qui veulent également s’implanter durablement sur le marché algérien du  »prêt- à -porter » dans le secteur du bâtiment notamment.

    La commande publique pour le programme national de l’habitat, estimé à plus de deux millions de logements, attire en fait beaucoup de postulants, d’opérateurs.

    Alger a même appelé les Espagnols et les Portugais à participer à ce programme sur lequel travaillent déjà les Chinois.

    A court terme et avec des recettes financières de plus de 60 milliards de dollars par an, l’Algérie redevient une grande destination pour les multinationales du bâtiment, des équipements industriels, de l’agroalimentaire ou tout simplement de l’industrie et de l’habitat.

    A Alger, on sait cependant que le temps presse et que l’arrivée d’opérateurs et investisseurs étrangers ne peut que donner plus de consistance à la relance de la croissance par la commande publique.

    Par Ali Sassi

  • Faire le tri !

    A peine installé au palais du gouvernement, Abdelmalek Sellal affirme qu’il a la ferme intention de donner un grand coup de balai dans la ville. Un peu comme pour rappeler qu’un des thèmes centraux de la politique environnementale de l’Algérie est l’élimination des déchets, principale préoccupation en milieu urbain.

    « Il faut nettoyer le pays », avait asséné le Premier ministre.

    La « sentence », une fois la surprise passée, est mise à exécution par une circulaire du ministre de l’Intérieur sommant les walis d’entreprendre une opération d’envergure en vue « de débarrasser l’Algérie des ordures ménagères et autres saletés ».

    Et au tout nouveau ministre de l’Environnement d’annoncer la mise en place prochaine « d’un mode de gestion qui permette que cette propreté dure dans le temps » Si d’aucuns ne croient pas vraiment à cette décision politique qualifiée d’ailleurs « d’opération marketing », d’autres estiment que c’est là une opportunité pour partir sur de nouvelles bases parce que à quelques semaines des élections locales.

    Une nouvelle Assemblée populaire communale suppose un nouveau mode de gestion. Donc une autre approche de la gestion de la ville. Si bien sur l’argument « du manque de moyens » n’est pas comme à l’accoutumée mis en avant pour justifier l’incapacité de mettre en place un système de gestion des déchets articulée autour d’un système de tri qui faciliterait leur recyclage.

    Cette décision intervient également à un moment où l’on commence en Algérie à se rendre compte que la protection de l’environnement est une opportunité génératrice de croissance et d’emplois D’ailleurs, l’idée commence à faire son chemin et l’on parle de plus en plus d’économie verte ! « Pas encore introduite », rectifient les experts qui préfèrent parler d économie circulaire.

    Quelle que soit l’appellation, de nombreux « chineurs » ont investi le créneau depuis quelques années déjà. Un réseau informel règne sur le monde de la collecte du tri et de la valorisation des déchets.

    La nature ayant horreur du vide, il a même imposé ses « règles » « La récupération et le traitement des déchets par les personnes et les entreprises qui ont une existence administrative et fiscale ne dépassent guère 4% des quantités générées », a fait remarquer le directeur de l’AND lors d’un symposium sur l’employabilité et entreprenariat pour les jeunes et les femmes dans l’économie verte en Algérie.

    Le constat est sans appel !

    L’Algérie, comme en témoigne le rapport national présenté à l’occasion de la 19e session de la commission de développement durable des Nations Unies, n’a pas lésiné sur les moyens pour combiner développement durable et économie verte.

    Reste malheureusement que les dispositifs d’aides à la création d’emplois n’encouragent pas l’émergence de micro-entreprises pouvant intervenir dans la filière de la gestion des déchets.

    Pourtant, des expériences individuelles tentées ici et là démontrent que l’économie verte ou circulaire, c’est selon, constitue un réel gisement à l’emploi.

    Le tout serait de faire le tri dans la nomenclature de formation et activité classique et d’y introduire les métiers verts si l’on tient à réduire le chômage.

    Par Saida Azzouz

  • Les idéaux et les IDE

    Le constat est clair : les Investissements Directs Etrangers -IDE- en Algérie marquent le pas depuis 2009.

    Coïncidence ou pas, c’est également l’année de la mise en oeuvre de la règle des 49-51%. La loi de finances complémentaire de 2009, qui a introduit cette règle pour régenter les investissements étrangers en Algérie, semble avoir repoussé, sinon refroidi les ardeurs de nombre d’investisseurs potentiels sur le marché algérien.

    Associer un partenaire algérien rebuterait en fait beaucoup de porteurs de projets étrangers, dont certains projets sont des délocalisations ou des projets neufs, notamment dans le BTPH, l’agriculture ou l’agroalimentaire et les services. Des secteurs à forte valeur ajoutée, créateurs d’emplois et qui assurent un retour rapide sur investissement.

    Durant les cinq dernières années, le montant global des investissements directs étrangers en Algérie avait atteint les 8,25 milliards de dollars selon un bilan de l’ANDI.

    C’est à dire moins de deux milliards de dollars pas an. La tendance à la chute libre des IDE en direction de l’Algérie par rapport à d’autres pays africains comme le Nigeria, l’Egypte ou même le Congo, est par ailleurs confirmée par la conférence des Nations-Unies sur le commerce et le développement ( Cnuced ).

    Elle estime même que les IDE sont en net recul en Algérie. Selon le rapport mondial de 2011 de la Cnuced, l’Algérie, même si elle est classée à la 8éme position en Afrique, n’a pu capter que 2,29 milliards de dollars d’IDE en 2010 contre 2,76 Mds de dollars en 2009. Et, sur l’ensemble des investissements hors hydrocarbures réalisés au cours des cinq dernières années, les IDE sont orientés vers l’Industrie, les médicaments, l’agroalimentaire et les matériaux de construction.

    Ce n’est pas une configuration type investissements dans le secteur des hydrocarbures avec un chèque de plusieurs milliards de dollars, mais le fait est que les IDE en 2012 devraient enregistrer une courbe descendante.

    La cause? Beaucoup de patrons de PME algériennes pointent du doigt la  règle des 49-51%, même si les responsables de l’ANDI estiment le contraire, chiffres à l’appui, mais seulement pour les projets « déclarés  » et non effectivement entamés ou réalisés. Il y a, d’autre part, les difficultés que rencontrent les opérateurs étrangers à rapatrier leurs bénéfices réalisés en Algérie, ou les conditions draconiennes qui leurs sont imposées par rapport aux facilités accordées aux investisseurs étrangers par des pays voisins ou africains. Au final, l’Algérie reste une terre qui n’attire pas vraiment les grandes compagnies internationales.

    En fait, le climat des affaires s’est dégradé en Algérie au cours de ces dernières années. Le rapport Doing Business 2012 établi annuellement par la Société financière internationale (SFI), organe chargé du secteur privé à la Banque mondiale, l’affirme. Il classe l’Algérie à la 148e place sur les 183 pays étudiés, le pays a ainsi enregistré une perte de cinq places par rapport à 2011. Un signe évident d’une détérioration de l’environnement des affaires.

    A titre comparatif, il faut moins d’une semaine pour un investisseur étranger pour inscrire son projet et finaliser toute la paperasse au Maroc, et environ deux semaines en Tunisie et plus près de six mois en Algérie. Le climat politique délétère qui règne en Afrique du Nord, sur le sillage du Printemps arabe, est l’autre raison avancée pour expliquer le coup de frein donné aux IDE en direction de cette région.

    Par Ali Sassi   

  • Franchement pas évident !

    Franchement pas évident !

    L’Algérie ne fait pas partie des autoroutes des franchises. Ou, du moins, pas totalement. Trop d’éléments font que notre pays reste encore à la traîne pour certains, pas encore préparé pour d’autres.
    Les franchises, il s’agit en fait de maisons industrielles ou de renommée internationale, évoluent, pour celles qui ont fait leur entrée sur le marché national, dans un environnement économique et commercial autre que celui de leur «milieu naturel».

    Avec ce qu’il suppose comme industries tournées vers la consommation, les financements pour la recherche de produits nouveaux, les marchés financiers pour soutenir le système et en bout de chaîne, en plus des grands magasins du luxe (parfums, cosmétiques), de l’habillement, de la chaussure ou de l’électroménager, de bons salaires.
    Ce n’est pas par un tour de passe passe, comme diraient les plus sceptiques, que les franchises vont s’installer du jour au lendemain sur le marché algérien. L’exigence de ce marché est telle qu’il faut au préalable mettre en place toute une architecture économique, commerciale, douanière et administrative pour que les grandes enseignes internationales, de l’habillement ou de luxe, s’installent sur le marché algérien.
    Il leur faut également de solides garanties pour à la fois faire de bons chiffres d’affaires et mettre en valeur leurs produits. Certes, l’Algérie s’ouvre progressivement vers ce type d’économie commerciale, mais le chemin est encore long pour qu’Alger, Oran, Annaba et Constantine deviennent des villes où l’on peut s’offrir des produits de grandes enseignes de la parfumerie, de l’horlogerie ou de l’habillement.

    L’îlot de Bab Ezzouar existe, certes, avec la présence d’enseignes respectables, des marques renommées qui, au demeurant ne font pas du chiffre d’affaires mais juste pour jauger le marché national. Car, en fait, l’économie algérienne reste encore en deçà des exigences qui font que les franchises pénètrent et prospèrent partout dans le monde.

    Les franchiseurs n’ont pas beaucoup de marge de manoeuvres pour rapatrier les dividendes
    réalisés en Algérie. Cela, ils le laissent aux franchisés qui, eux, se débrouillent comme ils peuvent pour «durer» sur un marché où la demande est faible, sinon dérisoire.

    Et puis, il y a la grande muraille (de Chine) que constituent les prix des produits des enseignes internationales. Les articles ne sont pas à moins de 100-150 euros, ce qui est, il faut le reconnaître, largement au dessus des moyens de l’algérien.
    Mais, il faut cependant relativiser les choses, car les produits de luxe ne sont pas pour une clientèle «smicarde». Ils visent bien au contraire «la crème» des salariés et des gros salaires et des professions libérales.

    Cela fonctionne comme ça, de Paris à New York et Tokyo, pourquoi pas à Alger ? Moins d’une centaine de grandes franchises brassent ou surnagent sur le marché algérien, et, hormis deux ou trois enseignes, les autres arrivent à tenir bon. Il y a une demande ciblée, le marché marche, et cela donne, en fait, une image grandeur nature des possibilités, sinon des potentialités du marché algérien, même si la valeur du dinar par rapport aux principales devises est l’autre grand handicap pour un réel développement des franchises en Algérie.

    Par Ali Sassi   

  • « Les problèmes de l’entreprise sont les problèmes du pays, les problèmes du pays sont les problèmes de l’entreprise »

    « Les problèmes de l’entreprise sont les problèmes du pays, les problèmes du pays sont les problèmes de l’entreprise »

    Il convient d’emblée de souligner que l’on ne souhaite jamais assez, la bienvenue à un support médiatique dédié exclusivement à l’entreprise et son univers.
    En effet, l’émergence sur le marché national d’un tel support est d’autant plus souhaitable qu’il nous parait répondre à un vrai besoin de l’opinion publique de mieux connaitre la réalité du monde de l’entreprise, ses contraintes et ses difficultés et pourquoi pas ses ambitions légitimes particulièrement dans une conjoncture de crise économique mondialisée.

    Cette crise qui, du reste, place partout l’entreprise, ici et ailleurs, au cœur des enjeux des politiques et stratégies de riposte destinées à limiter ses retombées et ses impacts destructeurs.
    A cet égard, il nous parait utile de rappeler que depuis le déclin quasi planétaire des idéologies, l’entreprise est devenue partout ailleurs dans le monde, un centre d’intérêt universel au regard notamment des fonctions vitales qu’elle assure dans l’animation de la vie économique, sociale et culturelle des sociétés.
    En effet l’entreprise est perçue, à juste titre, comme l’espace privilégié:
    • De valorisation et de création des richesses;
    • D’exploitation et de réalisation des inventions et innovations technologiques et de développement de la recherche de concert avec les universités, les laboratoires et les centres scientifiques;
    • Le lieu de production et de partage du travail.
    Il convient également d’observer qu’en sus de toutes ces fonctions traditionnelles et historiques, l’entreprise ne cesse de voir sa vocation s’élargir de nos jours. Elle est devenue en effet le fer de lance du développement durable. Elle assume de nouvelles responsabilités sociale et citoyenne et prend en charge d’autres valeurs et dimensions d’éthique (solidarité et lutte contre les phénomènes de précarité et de fragilité sociales…).

    Des ressources et des budgets appréciables sont consacrés à ces nouvelles activités ce qui a largement contribué à améliorer l’image de l’entreprise qui est dès lors de moins en moins perçue comme seul espace de maximisation des profits et d’exploitation des rentes.
    C’est dire toute l’importance que représente, aujourd’hui, l’entreprise dans l’économie réelle. C’est fondamentalement pour cette raison que les États et les gouvernements dans le monde s’ingénient en permanence pour concevoir, élaborer et adopter des politiques publiques toujours plus innovantes en matière de soutien, d’encouragement, d’assistance et de promotion de l’entreprise.

    L’objectif recherché, en priorité, par ces États et gouvernements est de libérer l’entreprise de toutes formes de contraintes, de bureaucratie et d’obstacles dans le but de la rendre toujours plus efficiente, plus rentable et plus conquérante sur les marchés et partant plus utile à la société.
    C’est à cette fin que des centaines de réglementations et de codes d’investissements ont été mis au point dans de nombreux pays.
    Ces réglementations et codes subissent d’ailleurs à intervalles réguliers des adaptations, des corrections et des amendements dans l’objectif de rendre l’environnement de l’entreprise et le climat des affaires en général plus attractif et plus coopérant.

    Bref, l’on ne refuse rien à l’entreprise pour lui permettre de réaliser sa vocation et ses objectifs et d’accomplir, dans l’intérêt de tous, ses missions socio-économiques.
    En Algérie le rôle de l’entreprise n’en est pas moins important surtout lorsque l’on sait que le pays doit déjà faire face efficacement et durablement à des menaces et des périls réels que sont :
    • Le chômage et la forte dépendance de la rente pétrolière pour assurer le financement des besoins économiques et sociaux, laquelle rente est elle-même en tant que ressource fortement précaire car épuisable à plus ou moins long terme et totalement soumise aux perturbations du cours sur le marché international.
    C’est donc pour toutes ces raisons et ces réalités amères qu’il n’est pas exagéré, à notre sens, de souhaiter que l’entreprise, en Algérie soit véritablement érigée au rang de cause nationale. Car il est grand temps de prendre conscience à l’échelle de toute la société que les problèmes de l’entreprise sont les vrais problèmes du pays.
    Ceci étant, nous formons le vœu pour que cette nouvelle revue DZENTREPRISE puisse devenir rapidement la tribune et le porte-voix des patrons et managers des entreprises du pays. Nous souhaitons également que ce support puisse jouer dans un proche avenir le rôle d’un véritable centre de résonance dont l’écoute par les pouvoirs publics notamment, servira la cause légitime du monde des entreprises.

    Par Bakhti Belaib
    Ex ministre du commerce