Comment faire dans le softpower sans tomber dans la propagande et changer positivement la perception des autres sur soi dans un monde où une simple vidéo circulant sur les réseaux sociaux pourrait tout faire basculer en l’espace de quelques heures ?
C’est à cette question que les intervenants à la rencontre organisée par le bureau d’Alger la fondation allemande Konrad Adenauer a organisé ce mardi, dans un contexte marqué un recours de plus en plus important à d’autres moyens que la guerre ou les sanctions pour imposer des changements politiques dans un pays tiers ou pour soigner l’image ternie d’un pays.
«Il y a plusieurs manières de faire dans le softpower, à travers la culture, le sport, l’art culinaire, le tourisme, l’aide humanitaire, etc. », explique Ouiza Galleze, chercheure au Centre national de recherche préhistoriques et historiques (CNRPH), lors de son intervention introductive au concept du softpower et sa place dans les relations internationales. Car, il s’agit bien de relations internationales qui connaissent aujourd’hui un bouleversement, en partie impulsé par les nouvelles technologies de l’information et des télécommunications.
«Le softpower, c’est parler de soi sans utiliser la guerre », rappelle l’intervenante, affirmant que dans le cas de l’Algérie le softpower a permis de replacer le pays en orbite, notamment à travers des ressources symboliques et l’organisation de nombreux événements politiques, diplomatiques, sportifs, culturels et scientifiques d’envergure régionale, continentale et internationale.
«Nous baignons dans le softpower qui joue un rôle de premier ordre dans la diplomatie », insiste Mme Galleze, estimant qu’il est nécessaire de « fédérer toutes les forces vives du pays et valoriser les compétences existantes, en créer des lobbys pour aller vers une culture populaire ».
Autrement dit, cet exercice à la fois d’influence et de séduction n’est pas seulement du seul ressort de l’Etat et de son appareil diplomatique. Mais la société civile dans son ensemble (figures sportives, culturelles, influenceurs, etc.) est également concernée, au même titre d’ailleurs que les entreprises privées qui ont, elles aussi, un rôle à jouer, souligne Isabelle Werenfels, chercheure allemande et membre de la Fondation Science et Politique (SWP), lors de son intervention en ligne.
«Il n’est pas facile de saisir la méthodologie du softpower», reconnait toutefois Mme Werenfels, expliquant «c’est une dynamique qui s’appuie et mobilise la société civile, les entreprises privées, le sport, la culture et l’éducation. C’est cet ensemble qui propulse le softpower ».
Mais le véritable défi du softpower c’est de ne pas tomber dans le piège de la propagande et de la désinformation, affirme la spécialiste de l’Afrique et du Moyen-Orient, expliquant par ailleurs que le softpower exercé par l’Etat intervient sous plusieurs formes et à travers plusieurs canaux, citant les médias, la religion, la culture et l’éducation, les aides au développement, le cinéma, la télévision, la littérature, les échanges universitaires, la projection de certaines valeurs comme la démocratie, la lutte pour les droits des femmes et en faveur du climat, la diplomatie humanitaire et sanitaire, le tourisme, la mode, etc.
«On peut capitaliser sur certaines ressources symboliques, politiques, culturelles, religieuses, etc., pour faire dans le softpower, dans le cas des pays qui ne disposent pas d’assez de moyens financiers », note encore Isabelle Werenfels, avertissant sur le fait que «sur le long terme, les médias affaiblissent le softpower, parce qu’il est difficile de projeter une image cohérente du pays ». En d’autres mots, l’intervenante explique que le softpower est un travail continu.
Le sport constitue un pan entier de la stratégie d’influence d’un pays. Les exemples ne manquent pas aussi bien dans notre pays que chez d’autres nations qui se livrent une guerre mais sans armes pour abriter une compétition internationale, notamment dans les sports populaires, comme le football ou les jeux olympiques, explique pour sa part Brahim Kas, expert géopolitique Afrique du nord/Proche-Orient et géopolitique du sport. «Il ne faut pas perdre de vue que la diplomatie du sport c’est aussi du commerce », rappelle M. Kas qui prône la mise en place des pays du Maghreb d’une politique sportive pour la détection des talents sportifs.
Sophia Rais
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