Les deux tiers de la commande émanent de musiciens.
Cette petite entreprise familiale, un héritage transmis de père en fils depuis des siècles, est aujourd’hui le refuge de nombreux artistes, et pas que, qui viennent chercher leur « bonheur » chez les Châfaa.
L’entreprise dans laquelle on travaille en famille, est implantée à El-Achour dans la commune de Delly Brahim à Alger.
Cette petite fabrique, mise entre parenthèses durant la guerre de libération, a été ramenée à la vie, après l’indépendance par Mohamed Châfaa, le père du propriétaire actuel.
Rachid avait dès l’âge de 12 ans touché au bois. Il en fera, de l’avis de ses clients, « des merveilles ». «J’ai toujours vu mon père et mon oncle fabriquer des instruments musicaux, un métier dont je ne voyais que le côté obscur, vu que ce n’est pas un métier facile ; alors que l’Algérie était encore colonisée, j’ai découvert un univers merveilleux lié directement à ce métier ».
Une délivrance !
Rachid Châfaa nous accueille dans son atelier avec son ainé. A ce dernier, il compte passer le témoin. La relève est assurée. Le petit atelier, ou foisonnent des pièces en attente de finition. ,c’est autant d’instruments musicaux en chantier et dont la majorité a été commandée par des musiciens algériens.
L’atelier est divisé, sans l’être vraiment, en de petits ateliers.
L’un de débit où l’on déligne et découpe les pièces de bois où règnent d’imposantes machines. En premier lieu, c’est l’odeur agréable du matériau, combiné à la simplicité et à l’hospitalité des artisans-artistes, nous plonge dans une atmosphère des plus sereines. Ici, l’expression « joindre l’utile à l’agréable » trouve tout son sens.
Pourtant nous sommes bien dans une fabrique.
Les Châfaa, fabriquent aujourd’hui entre 10 et 15 instruments par an, une dizaine est destinée à l’exportation dont des violons, des guitares, des guitares électriques, des aaôud, des banjos et des guitares à double manches. Et les étapes et procédés de fabrication diffèrent d’un instrument à l’autre.
Tout commence par la réalisation et la lecture du plan où l’artisan crée l’instrument, puis le traçage et la découpe du bois qu’on aura au préalable bien choisi.
S’agissant du choix du bois , Rachid Châfaa confie à DZEntreprise que trouver la matière qu’il faut reste très compliqué dans notre pays «Parfois même inaccessible. Par exemple, j’aime beaucoup l’érable anglais à cause de ses belles rayures.
La pièce de bois est prise à l’axe de l’arbre et séchée pendant très longtemps.
Le bois ne doit pas se déformer, ce qui fait de lui la matière la plus chère dans la fabrication des instruments .»
Un cout que l’artisan peut difficilement intégrer dans le prix de vente de l’instrument.
Une parenthèse que notre hôte ferme très vite, pour nous raconter avec une gestuelle propre aux artistes et aux Algérois la découpe du bois, « on obtient la pièce essentielle pour la fabrication de l’instrument musical jusqu’au vernissage et la finition » et à la manière dont les Châfaa décrivent le métier, on ressent toute la passion que l’artisan luthier met pour « On y met toute notre âme.
Il faut beaucoup de concentration pour ne pas se tromper dans les calculs nécessaires pour le placement des cordes et donc des notes musicales.
La fabrication des instruments musicaux est un travail très délicat.
L’usinage du corps où on donne à l’instrument sa forme finale, le travail sur le manche, l’enclave et le corps où on fixe le manche au corps, qui diffère bien sûr d’un instrument à un autre.
Après la finition du corps jusqu’à la fixation des cordes, vient le montage des pièces restantes, notamment le micro et les câblages (en particulier pour les guitares électriques) et, enfin, l’essai de l’instrument. »
Bien que son atelier soit une entreprise avec tout ce que cela suppose comme tracasserie de gestion, de la rareté de la matière première et de la main- d’oeuvre , tout en se désolant que bon nombre de structures dédiés à l’apprentissage de la musique et des instruments recourt à l’importation pour équiper les écoles au lieu de faire travailler une entité algérienne, Rachid Châffa décline toute question relative à la vie de son entreprise.
Se contentant de dire que les difficultés qu’il rencontre « sont celles de la quasi-totalité des artisans algériens, notamment l’inexistence d’une politique de formation qui permette la transmission du métier aux générations futures » et de rappeler, un peu comme pour dire que son métier est ancestral, que l’entreprise Châfaa a équipé des chantres tels que Hadj L’Aanka, Boudjemâa Lankiss, Hamdi Benani, Matoub Lounès, Ait Manguelat, Takfarines et bien d’autres .»
Les Châfaa confectionnent des pièces exceptionnelles et parfois uniques comme la fameuses guitare à double manche de Takfarines que nous avons été les premiers à fabriquer dans le monde arabe.
L’idée venait de l’artiste, il en a imaginé une et moi une autre. Quand Takfarinas a vu la maquette, il a tout de suite validé»
L’entreprise de Châfaa, même si elle est «une toute petite entreprise familiale», jouit d’une très grande notoriété dans le monde musical.
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