Le ralentissement de l’économie et la contraction de la croissance à l’échelle mondiale, dont les effets sont d’ores et déjà perceptibles à travers plusieurs pays, y compris ceux industrialisés, risque de perdurer et se projeter à long terme.
C’est ce que vient de relever un nouveau rapport de la Banque mondiale, publié à la fin du mois de mars écoulé, selon lequel, «la vitesse limite de l’économie mondiale, c’est-à-dire le taux de croissance maximal à long terme sans risque d’inflation, devrait tomber à son niveau le plus bas depuis trois décennies d’ici 2030».
Faisant allusion aux épisodes de crises que traversent de nombreuses économies au monde, notamment en Europe et aux Etats Unis, le rapport de 560 pages, passant à la loupe les différents aspects et secteurs d’activité de chaque région et sous-région au monde, met en garde aussi que «les crises bancaires systémiques et les récessions ont des conséquences durables sur la croissance et le développement».
Constat qui intervient au moment où une crise financière similaire à celle de 2007/2008 a failli dégénéré en mars dernier du fait de la faillite de la banque américaine Silicon Valley, mais aussi du Crédit Suisse, tandis que des économies aussi puissantes comme la Grande Bretagne basculent dans la récession durant l’année en cours, a averti récemment l’autre institution de Bretton Woods qu’est le FMI.
Dans son constat on ne peut plus pessimiste, le nouveau rapport de la Banque mondiale relève un net affaiblissement des leviers de croissance durant les 7 à 8 années à venir par rapport à la première décennie des années 2000.
«Entre 2022 et 2030, la croissance moyenne potentielle du PIB mondial devrait reculer d’environ un tiers par rapport au taux qui prévalait au cours de la première décennie de ce siècle, et tomber à 2,2 % par an », notent les experts de la Banque mondiale dans ledit rapport, intitulé « des perspectives de croissance à long terme en baisse : Tendances, attentes et politiques », ce qui les amène à constater un « déclin progressif de la quasi-totalité des forces économiques qui ont favorisé le progrès et la prospérité au cours des trente dernières années ».
Par zone géographique, le même rapport relève des contractions mitigées d’une région à une autre, précisant que « pour les économies en développement, la baisse sera tout aussi marquée : de 6 % par an entre 2000 et 2010 à 4 % par an pendant le reste de la décennie actuelle. En outre, les baisses seraient beaucoup plus prononcées en cas de crise financière mondiale ou de récession ».
Toutefois, en dépit des facteurs plombant l’économie mondiale ces trois dernières années qui perdurent encore, (à savoir les retombées de la pandémie de Covid-19 et de la guerre en Ukraine), les auteurs du rapport en question demeurent rassurants, en notant que le phénomène limitant la vitesse de croissance de l’économie mondiale « n’est pas irréversible ». Pour ce faire, le rapport suggère d’aller vers «des politiques qui encouragent le travail, augmentent la productivité et accélèrent l’investissement» pour juguler cette tendance.
Dans leur argumentaire, les experts de la BM montrent que, «si les pays adoptent des politiques durables et axées sur la croissance, la progression potentielle du PIB peut être stimulée de 0,7% pour atteindre un taux annuel moyen de 2,9 %. Ce qui permettrait d’obtenir, au lieu du ralentissement prévu, une accélération du taux de croissance potentiel du PIB mondial».
Au niveau des pays en développement, la tendance au ralentissement qui se dessine à l’horizon 2030 peut être renversée si «chaque économie en développement devra reproduire ses meilleurs résultats des dix dernières années grâce à la mise en œuvre de mesures diverse», alors qu’ «à l’échelon international, la réponse politique suppose une coopération mondiale plus étroite et un effort accru pour mobiliser les capitaux privés.»
Gagner jusqu’à 1,2% de croissance en Afrique du Nord
Dans sa série de recommandations qu’il formule pour enclencher un cycle de croissance plus dynamique que ce que présagent les indicateurs actuels, le rapport met en avant des « mesures spécifiques à prendre par les pays » à plusieurs niveaux, comme la gestion budgétaire et monétaire, l’investissement et le marché du travail, la maîtrise des coûts des échanges commerciaux entre autres.
Au niveau des politiques budgétaires, il est recommandé aux pays dans le nouveau rapport de la Banque mondiale d’ «harmoniser les cadres monétaires et financiers » de leurs économies respectives. Pour ce faire, «Les décideurs politiques devraient donner la priorité à la maîtrise de l’inflation, à la stabilité du secteur financier, à la réduction de la dette et au rétablissement de la prudence budgétaire». Ces mesures sont considérées comme étant susceptibles d’ « aider les pays à attirer les investissements en inspirant la confiance dans les institutions et les politiques nationales».
L’accroissement du marché du travail est également perçu comme un facteur idéal pouvant booster la croissance à l’horizon 2030 dans le rapport en question qui relève qu’ « environ la moitié du ralentissement attendu de la croissance du PIB potentiel jusqu’en 2030 sera imputable à l’évolution démographique, notamment à la diminution de la population en âge de travailler et à la contraction de la main-d’œuvre à mesure que les sociétés vieillissent ».
La dynamisation du marché du travail pourrait ainsi faire gagner 0,2% à la croissance mondiale d’ici la fin de la décennie, alors que dans des pays comme ceux d’ « Afrique du Nord, la hausse du taux d’activité des femmes pour atteindre la moyenne de l’ensemble des marchés émergents et des économies en développement pourrait accélérer la croissance potentielle du PIB de 1,2% par an entre 2022 et 2030».
Enfin, estiment les rédacteurs du rapport de la BM, l’intensification des investissements dans des secteurs jugés à forte valeur ajoutée comme les transports, l’énergie, l’industrie et l’agriculture pourrait faire gagner 0,3% à la croissance mondiale d’ici 2030.
M. Naïli
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