Boukhalfa Laala, expert agricole:«la filière avicole est dominée par l’informel »

Demain samedi, Abdelkader Bouazghi, ministre de l’agriculture rencontrera les acteurs de la filière avicole, qui connait un désordre chronique  et reste dominée à 80% par l’informel.

Une filière que connait très bien Boukhalfa Laala, expert agricole qui nous rappelle que « dans le passé et avant l’ouverture du marché, les mises en place des cheptels étaient effectuées en fonction de la norme de consommation par individu. Les agréments étaient  accordés seulement aux éleveurs répondant aux normes et maîtrisant les conditions technico-sanitaire des élevages. Cette stratégie était  généralisée à travers l’ensemble des wilayas. »

Ce rappel fait, Boukhalfa Laala, expert agricole, ex  Pdg  du Complexe Avicole de Batna, affirme que  la filière vit des conjonctures économiques difficiles et chroniques. « Parfois c’est l’éleveur qui est victime car obligé de céder sa production nettement au-dessous de son coût de production  vu que l’offre dépasse largement la demande du marché. Dans ce cas précis et en l’absence de moyens pour la prise en charge des excédents, notamment les abattoirs industriels, les infrastructures de stockage en froid et surtout les unités de transformation, l’éleveur abandonne son activité pour créer un « creux » et là, la  demande se fait sensiblement ressentir ce qui entraine la flambée des prix. » Explique notre interlocuteur  qui précise que dans ce cas précis c’est le consommateur final qui est la 1er victime. Et le phénomène et cyclique et récurent.

Pour y remédier les pouvoirs publics  ont récemment décidé de supprimer la TVA pour encourager les aviculteurs et par-delà contribuer à réduire le prix du kg de poulet. Mais est-ce la panacée ?

«L’exonération de la TVA n’a jamais été la solution principale, d’ailleurs ce n’est pas la première fois que les pouvoirs publics prennent de telles décisions.» Affirme Boukhalfa Laala, qui soutient qu’au final, cette décision n’est  bénéfique qu’aux importateurs des intrants, notamment le maïs et le tourteau de soja, en matière de trésorerie. « Le produit final n’est pas concerné par cette mesure, la TVA est donc  supportée par le dernier maillon de la chaîne : le consommateur. »Fait remarquer l’expert agricole, qui indique qu’en réalité  l’aviculture se pratique à hauteur de 80% dans l’informel, en raison  de l’absence d’un suivi rigoureux et permanent sur le terrain.

«Les éleveurs et leurs infrastructures des élevages ne sont pas identifiés. Les transactions commerciales se pratiquent en majorité en noir. De telles pratiques sont  nuisibles et causent parfois des préjudices à l’économie nationale et surtout à la santé humaine.»Affirme notre interlocuteur qui préconise  la mise en place d’une stratégie de régulation en amont basée sur le suivi rigoureux et permanent des mises en place des cheptels reproducteurs.

«Dans ce cas et pour être précis, il faut rappeler que chaque reproductrice donne une moyenne de production par cycle. Connaissant la norme de consommation par individu et le nombre d’habitants, les besoins deviennent un calcul mathématique. La détermination du seuil de mise en place des reproducteurs plus au moins 20% devient impératif. La réussite certaine dans le secteur avicole dépendra de la maîtrise de certains paramètres notamment : les conditions d’élevages surtout les mortalités qui ne devront pas excéder le seuil toléré de 3 à 7%, alors que certains éleveurs font même plus de 30%. »

L’indice de consommation doit être  également respecté, il ne devrait pas, selon Boukhalfa Laala, excéder le 1,82, alors que chez certains éleveurs il dépasse de loin le 3. « Il  y a aussi la qualité d’eau qu’il faut assurer pour le cheptel, l’homogénéité des cheptels est un autre élément primordial à assurer pour avoir un cheptel homogène à hauteur de plus de 80%.

La maîtrise de l’ensemble de ces paramètres permettra d’assurer un élevage réussi avec une réduction très sensible et importante en matière de coût de production.

L’Algérie dispose de tous les moyens pour devenir un pays producteur avicole par excellence; seulement cela nécessite la mise en place d’une stratégie organisationnelle en amont et en aval de la filière avicole, par notamment  l’instauration d’un suivi permanent et d’un contrôle régulier et rigoureux. La première étape devrait porter sur l’identification des éleveurs et de leurs infrastructures par segment d’activités. »Dira pour conclure  Boukhalfa Laala, expert agricole.

R.N

 

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